Flournoy et William James (droite) / Photo : D.R.

Théodore Flournoy & Michel Beretti

Les débuts de la psychanalyse en Suisse

Théodore Flournoy (1854-1920) de l'occulte à l'inconscient.

À partir de 1894, Théodore Flournoy, médecin et philosophe genevois, travailla avec Elise Muller, médium, pour tenter de comprendre comment elle pouvait parler le sanscrit, elle qui n'avait pas fait d'études, se réincarner en une antique princesse indienne, visiter Mars et en parler la langue. Pouvoir de l'occulte ? Pouvoir du psychisme ? Autour de ces séances, les savants de Genève - des orientalistes mais aussi Ferdinand de Saussure - tentèrent de percer les énigmes ainsi mises en scène. De ces années de fréquentation et d'interrogations, Théodore Flournoy écrit un ouvrage en 1900, "Des Indes à la planète Mars". Le savant ose cette écriture en utilisant le pronom «je» ; il y retranscrit fidèlement le dispositif qui permit à Elise Muller de lui fournir ce qu'il espérait, et la dénomma Hélène Smith. L'investissement d'un scientifique dans les phénomènes occultes était dans l'esprit de l'époque. Myers à Londres cherchait également le pouvoir du psychisme dans ce qui défiait la raison humaine. Alors qu'à Vienne, Freud publiait la même année "La Science des rêves" et donnait, à travers sa clinique, ses lettres de noblesse à l'inconscient. Théodore Flournoy reste celui qui osa fréquenter les phénomènes occultes avec une passion de scientifique, y détecta les pouvoirs de l'inconscient, et favorisa l'entrée de la psychanalyse en Suisse, demeurant «l'ami paternel» de Carl-Gustav Jung. Texte: Mireille Cifali