Si dans cette chambre un ami attend… / Photo : Eduardo Serafim / CCS

Perrine Valli

Si dans cette chambre un ami attend… (55’)

Après des pièces marquées par une volonté d’interroger le politique et notamment la question de l’identité sexuelle (Je pense comme une fille enlève sa robe, autour du rapport à la prostitution, Je ne vois pas la femme cachée dans la forêt, trio autour des rôles identitaires), Perrine Valli laisse cette fois plus libre cours à la part abstraite et poétique de son travail (déjà présente dans ses précédentes pièces). Construit autour de l’idée de la chambre, Si dans cette chambre un ami attend… s’attache à ce qu’abrite cet espace, de l’amour aux larmes, de la sexualité au retour sur soi, du rêve au cauchemar et aux deuils réels et métaphoriques, celui de l’amour, celui de l’enfance. Revenant pour l’occasion à la forme du solo, qu’elle n’a pas pratiqué depuis 2007, Perrine Valli se livre ainsi à une forme d’introspection qui vaut pour la danseuse comme pour la figure féminine, interrogée ici dans son intimité, personnelle et fantasmée.
Très inspiré de « Lettre au maître, à l’ami, au précepteur, à l’amant », de la poétesse américaine Emily Dickinson, dont un extrait donne d’ailleurs son titre à la pièce, Perrine Valli creuse les figures liées à cet espace, en jouant avec un interlocuteur masculin, réduit au rôle de figurant, à une ombre, une présence fantasmagorique. Car ce qui compte ici, ce sont les projections, celles que chacun se fait dans l’espace vide de sa chambre, ces multiples possibles qui naissent et meurent chaque jour, ces inquiétantes visions qui parfois envahissent quand les limites s’abolissent, soulignées ici par une présence musicale proche de celle des films fantastiques. Comme les toiles de Balthus dont elle s’est quelquefois inspirée pour les postures, c’est à un voyage mental et imaginaire qu’invite ici Perrine Valli, marqué par le mystère et l’ambiguïté. (Texte d’Emmanuelle Mougne / Rencontres Chorégraphiques Internationales)

www.perrinevalli.fr